Roosevelt Island, New York, USA

La résidence étudiante The House at Cornell Tech

L’habitation passive la plus haute du monde repousse les limites des constructions écologiques avec l’aide de rupteurs de pont thermique 

Une habitation passive révolutionnaire

Roosevelt Island, New York – Avec ses 26 étages, The House at Cornell Tech est l’habitation passive la plus haute au monde. Situé dans la Roosevelt Island, cet immeuble résidentiel pionnier a été conçu en partenariat avec The Hudson Companies et The Related Companies.

Selon Julie Janiski, directrice adjointe du bureau d’études BuroHappold, qui a fourni des services de génie structurel, mécanique et électrique et des services de plomberie dans le cadre du projet, l’équipe était certaine de pouvoir satisfaire les normes de l’habitat passif dès ses premières rencontres avec Handel Architects, The Hudson Companies et Cornell.

Appliquer les règles de l’habitat passif à un gratte-ciel est révolutionnaire, car il s’agit de la norme d’efficacité énergétique la plus rigoureuse au monde. Mise au point dans la ville allemande de Darmstadt, dans les années 1990, elle diminue la consommation d’énergie de 60 à 80 % par rapport aux bâtiments traditionnels. Dans la résidence étudiante de Cornell Tech, elle devrait se traduire par une réduction annuelle des émissions de CO2 de 882 t, ce qui est crucial quand on sait qu’à l’heure actuelle, l’industrie du bâtiment est responsable de 39 % des émissions de gaz à effet de serre aux États-Unis.

Minimiser les ponts thermiques et maximiser les économies d’énergie

Comment la résidence est-elle parvenue à satisfaire aux critères de l’habitat passif ? D’abord, comme l’explique Julie Janiski, « toute la façade est isolante. Parce que le bâtiment est parfaitement isolé et hermétique, l’énergie nécessaire au chauffage, à la climatisation et à l’éclairage est réduite au minimum. »

Ensuite, dans le cadre de la stratégie écoénergétique du projet, la façade et l’orientation du bâtiment ont été pensées pour optimiser la gestion thermique et maximiser l’ensoleillement, respectivement. La tour dessine un long rectangle dont les longueurs sont orientées nord-sud pour que la façade absorbe un maximum d’énergie solaire. Cette orientation, de même que le triple vitrage, est un volet majeur de la norme de l’habitat passif.

Enfin, contrairement aux habitations classiques, les constructions passives sont conçues pour prévenir les ponts thermiques.

On parle de pont thermique quand les pénétrations structurelles d’un bâtiment, comme les balcons, les auvents et les parapets, conduisent la chaleur de l’intérieur vers l’extérieur à travers l’enveloppe isolée. Pendant l’hiver, ces éléments agissent comme des ailettes de refroidissement en aspirant la chaleur des dalles intérieures ou des supports d’acier pour la dissiper dans l’atmosphère. 

Où les rupteurs de pont thermique ont-ils été installés ?

Des rupteurs de pont thermique ont été ajoutés à la tour pour prévenir la formation des ponts thermiques aux points vulnérables de la façade, de la toiture et de l’entrée principale.

La façade du bâtiment, faite de panneaux métalliques préfabriqués, opère comme une couverture isolante. Cette enveloppe a dû être scellée en plusieurs endroits, notamment au niveau de la marquise d’acier qui surplombe l’entrée, des intersections des courbes de béton de la toiture, et de la façade sud-ouest, où un système d’aération à persiennes logé dans une embrasure s’élève sur toute la hauteur du bâtiment.

Comme l’explique Handel Architects, « cette embrasure est l’“ouïe” du bâtiment – un espace extérieur à persiennes qui abrite le matériel de chauffage et de climatisation qui fait respirer l’immeuble. Une tuyauterie assure la qualité de l’air intérieur en distribuant de l’air purifié dans les chambres et les séjours. » 

Dans les grandes tours, les systèmes mécaniques se trouvent généralement sur la toiture. Ici, ils ont été placés sur des balcons clos au coin de chaque étage pour chauffer et refroidir les appartements plus efficacement. Puisque ces espaces ne sont ni chauffés, ni climatisés, et sont aérés par des persiennes, des rupteurs de pont thermique y ont été posés. Ils séparent les dalles de balcon des dalles de plancher correspondantes tout en supportant des charges équivalentes à celle des prolongements de balcon classiques.

L’approche qui consiste à marier installations techniques et expression architecturale ne limite pas les possibilités conceptuelles, mais ajoutée aux critères LEEDMD, ainsi qu’à la norme de l’habitat passif – encore plus rigoureuse –, elle nécessite l’adoption de certaines technologies ainsi qu’un souci particulier du détail. 

Dans le cas de la tour Cornell Tech, les rupteurs de pont thermique ont permis de respecter le critère de l’isolation continue et de réduire ainsi les déperditions d’énergie de 80 à 90 % par rapport aux pénétrations de béton monolithe et d’acier dépourvues de ces éléments.

La communication, ingrédient essentiel de l’acceptation et de l’exécution 

« Les balcons sont des éléments complexes d’un point de vue structurel, explique Mark Paskus, associé chez BuroHappold Engineering. Schöck s’est basé sur nos dimensions et nos exigences de capacité pour certifier le modèle et le placement de ses rupteurs de pont thermique. »

Il ajoute que la construction de la marquise d’acier a nécessité de coordonner minutieusement les équipes, parce que les ingénieurs avaient besoin que le fournisseur leur donne certains renseignements pour produire leurs dessins, et parce qu’ils devaient de surcroît respecter les exigences de l’architecte, qui souhaitait que la marquise soit la plus mince possible. « Nous avons envoyé au fournisseur la liste des charges et des moments pour qu’il puisse concevoir le système en conséquence et nous livrer un produit adapté à nos caractéristiques techniques. »

Comme l’explique Mark Paskus, « la difficulté que posent les rupteurs de pont thermique réside non pas dans le produit en soi, mais dans le fait qu’il faut en expliquer le principe aux équipes et les convaincre de leur efficacité. Les entrepreneurs ne connaissaient pas ces produits et sont restés appréhensifs jusqu’à ce qu’ils constatent de visu, une fois l’étayage enlevé et les appareils installés, qu’ils fonctionnaient comme prévu. »

Ainsi, la coordination des corps de métier, l’annotation scrupuleuse des documents de construction et la participation du fournisseur ont été essentiels à la réalisation du projet. 

Des innovations conceptuelles et matérielles au service de l’habitat passif

En respectant les critères de l’habitat passif et en employant des technologies novatrices, The House at Cornell Tech révolutionne le domaine des constructions urbaines écologiques et ultraperformantes qui permettent de diminuer considérablement la consommation d’énergie et les émissions de carbone sans entraver ni la performance structurelle, ni la liberté créative des architectes.

Promoteur

The Hudson Companies/Related Companies

Architecte

Handel Architects

Ingénieur en structure

Buro Happold

Construction terminée

2017